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- Les Crayères - Reims- Tristes bulles
Samedi : départ 11h27 pour Reims à 45 minutes de Paris par le TGV Est. Une heure plus tard, notre petit groupe de 7 gourmands, pénétre dans une des 3 salles du restaurant du Château les Crayères, lieu vénérable, ancienne propriété de Louise Pommery, sous la baguette du chef étoilé Didier Elena.
Originaire de Monaco, Didier Elena est passé de l’Essex House de New-York, élu meilleur restaurant des Etats-Unis en 2001 aux bulles de champagne des Crayères de Reims en 2005. Pur produit de l’école Ducasse, formé au Louis XV, Didier Elena garde ses bases méditerranéennes pour proposer des plats décalés dans ce lieu très classique … On comprend ou non ce que signifie le service d’une flammekueche en amuse-bouche avec une coupe de champagne. Personnellement je n’ai pas compris mais après vérification c’est effectivement cet amuse-bouche qui est servi avec l’apéritif, ce n’est pas une erreur. Bizarre ! car nous sommes loin de l’Alsace et encore plus loin des rivages bleus azur du chef. C’est peut-être cela le décalage, et finalement elle était bonne cette incongrue flammekueche.
Deux menus nous sont proposés et nous choissisons tous le menu Tradition d’Aujourd’hui (185 euros), des plats revus et modernisés par le chef. L’autre menu propose des variations de saveurs autour d’une maison de champagne.
Nous aurions dû, je pense après réflexion, prendre ce menu à 305 euros ! avec le champagne. Il était proposé sans les Champagnes mais quel intérêt puisque les plats étaient élaborés en fonction de ces vins.
On nous propose divers pains spéciaux pour le repas, brioché, au comté, camembert ou vin rouge. Je n’aime pas manger ces pains “fantaisie” car je trouve souvent qu’ils viennent contrarier les plats qui nous sont servis. Je préfère une baguette au levain ou un pain aux céréales. Les pains "fantaisie" je les réserve pour accompagner une salade ou une soupe.
On nous sert rapidement la première entrée, une Royale d'oursin, foie gras et ormeaux. Présentation à l’asiatique dans un petit bol avec des paillettes d’algues nori. C’est bon mais difficile de retrouver l’oursin et l’ormeau. Les algues et le foie gras l’emportent. La portion est minuscule, trois bouchées et puis s’en vont…
Avec ce plat et le suivant, nous dégustons un Meursault 2000 Tessons Clos Mon Plaisir Roulot, ma foi très bon.
Le plat que j’ai préféré de tout le repas est ensuite servi : une Nicoise revue avec du tourteau, de l’avocat et des légumes en salade composée. La présentation est rectangulaire, nette et les légumes sont excellents. Dommage une fois de plus, cependant que l’on reconnaisse difficilement les saveurs, les unes des autres.
Deux plats de poissons accompagnés d’un Hermitage blanc 2005 Sterimberg Jaboulet Ainé, excellent, suivent les entrées.
La cuisson du turbot de Bretagne est parfaite. Il est servi avec des couteaux (première fois que j’en mangeais et ils n’ont guère d’intérêt) et une pulpe de tomate de septembre confite longuement. Le maître d’hôtel nous conseille de manger le turbot avec la tomate concentrée mais nous trouvons que cela ne fonctionne pas du tout. La tomate l’emporte sur le poisson. Il vaut mieux manger les couteaux insipides avec la pulpe de tomate. Bref, un plat qui nous a laissé un peu sur notre faim.
Vient ensuite le Saint-Pierre et ses gambas, pochés au fumet d’une bouillabaisse et d’une rouille allégée. Il est accompagné de chips d’aubergine et d’olives frites. Là encore, la bouillabaisse (bonne et puissante en bouche) emporte tout sur son passage. Les poissons reposent sur une légère purée qui n’apporte rien au plat je trouve. Un seul point intéressant, les olives frites…
Nous enchainons avec deux plats de viande, le service est rapide, pas toujours précis dans les intitulés mais il n’est pas obséquieux ou trop pressant.
Un agneau de lait nous est servi, enroulé dans un voile d’herbe. Il est accompagné d’aubergines fondantes au parmesan. Honnêtement, je n’ai pas du tout aimé : pour moi tout baignait dans l’huile d’olive ; l’agneau ou les herbes : impossible de les reconnaître dans la compotée d’aubergine. Très très déçue par ce plat.
Heureusement un Côte Rotie Jamet 2000, vient me consoler car le second plat de viande n’emporte pas les suffrages non plus. C’est une salade contemporaine (est-ce que contemporain veut dire mettre des fleurs de bourrache systématiquement, quelques chips de vitelotte et des lamelles de cèpes ?), avec des ris d’agneau de lait dorés, servie avec une vinaigrette chaude à la truffe noire. Nous n’avons pas senti la truffe, impossible de dire quelle note dominait ce plat. Insipide…
Vous me trouvez peut-être dure mais quand on mange dans ce genre d’établissement Relais et Châteaux, classés deux étoiles avec un chef reconnu et pour une somme assez conséquente, on espère au moins en ressortir avec les papilles émoustillées et des souvenirs gustatifs. Le problème est qu’individuellement les produits sont de qualité et cuits parfaitement mais l’alchimie ne prend pas. Tout est assez uniforme, linéaire, prévisible, noyé par la volonté de coller aux bases méditerrannéenes du chef. Sauf que l’on se trouve dans la Marne, dans un château fin XIX, et non sur la Côte d’Azur en train de regarder les yachts dans le port devant un menu payé au prix fort.
Les deux desserts servis avec ce menu, ne releveront pas l’impression générale laissée par les plats précédents.
3 boules d’abricots en gelée, servies avec une fine lamelle d’amandes et une gelée de groseille en Melba : bref : un dessert beaucoup trop figé et « gelée » pour moi, alors que la Melba appelle la décadence et la frivolité.
Le dessert du menu est une boule de chocolat Vénézuela dont le centre contient une mousse de caramel au beurre salé. Une sauce au chocolat versée sur la sphère de chocolat laisse apparaître la mousse en faisant fondre la coque.
Je n’ai pas l’impression que le dessert est émoustillé mes compères. En revanche mon dessert choisi dans le Menu Champagne était pour le coup beaucoup plus original et intéressant.
Une base sablée avec une crème et gelée au pamplemousse rose en amertume servie avec une crème de biscuits rose de Reims et d’un sorbet légèrement acidulé au champagne. Très agréable, pas trop sucré et pour une fan d’agrume comme moi, parfait pour clore le repas.
Quelques mignardises, un café sur la terrasse au soleil devant le parc, une balade digestive entre Basilique Saint-Rémi et la Cathédrale, avant de reprendre notre TGV pour Paris.
Nous sommes donc revenus déçus, mais il est vrai que nous avions placé la barre haute depuis L’Arnsbourg. On comprend qu’il y ait une vraie différence entre un 2 étoiles et un 3 étoiles mais, au regard de ce que nous avons pu manger, la déception vient probablement du fait que l’on n’est rien “appris” ou “découvert” lors de ce repas. Rien de révolutionnaire, qui ne vienne nous titiller l’esprit ou nous ouvrir de nouvelles perspectives gustatives. Aucun plat qui nous murmure que l’on en reprendrait bien un peu, ou qui nous fasse dire que l’on reviendrait bien faire une petite visite l’année prochaine. Peut-être nous sommes nous simplement trompé de menu…
Prochaine étape gastronomique : probablement Troisgros...