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- Oud Sluis, 3 étoiles entre terre et mer
Nous avons côtoyé les étoiles tout au long de ce week-end en Belgique avec un stop aux Pays-bas afin de découvrir les jeunes cuisiniers qui révolutionnent les palais gourmands de nos voisins du Nord. Leur chef de file est certainement Sergio Herman, à la tête de l'Oud Sluis *** dont les mérites ont été largement mis en valeur par les GoT. Nous sommes restés dans la région de Bruges et avons affolé les compteurs avec 4 restaurants étoilés en 3 jours mais seuls deux méritaient vraiment la visite.
Commençons par l’Oud Sluis, au centre d’un gros bourg à la frontière entre la Belgique et la Zélande, là où la terre et la mer se confondent, pays de l’huitre, de la salicorne, et de l’anguille. Comme pour l’Arnsbourg, nous sommes au bout du monde, ce bout du monde qui permet à l’imagination de se développer pour nous surprendre.
Un 3 étoiles dans le plat pays ne signifie pas un service guindé et un accueil obséquieux. Nous sommes rapidement conduits à notre table dans une des deux petites salles du restaurant (une quarantaine de couverts), la météo assez froide ne nous permet pas de prendre l’apéritif en terrasse. Notre table est sobre. Nous prenons une flute de champagne François Secondé, excellent et choisissons le menu Père et Fils avec la sélection des vins du jeune sommelier de la maison.
Quelques amuses-bouches arrivent en raffale sur notre table
-des chips de pommes de terre avec une crème à la coriandre et au gingembre (sans beaucoup d’intérêt)
- une émulsion d’asperges avec une dentelle en pâte filo
A peine le temps de finir notre flûte, que l’on nous sert un verre de Pacherenc de Vic Bihl – Jardins de Bouscassé d’Alain Brumont – 2007 – vin d’appelation Madiran.
D’autres amuses-bouche continuent d’arriver notamment une petite salade d’huitres de Zélande avec de la papaye verte et un croustillant d’huitres.
Une merveille de fraicheur iodée. Décidement j’aime beaucoup la façon dont on nous présente les huitres dans les restaurants étoilés.
Viennent ensuite :
- un biscuit d’olives noires, différentes strates d’olives avec un pain d’olive – la présentation est juste parfaite et la douceur des olives s'arrondit en bouche,
- un tartare d’homard, accompagné de sa pétale de rose, d’une émulsion d’agrumes avec une perle d’huile d’olive et des germes de blé. Le contenant est superbe, mais il y a trop de saveurs pour que l’on puisse les ressentir individuellement.
- Enfin nous finissons nos apéritifs avec un couscous maison accompagné de couteaux, sauce paprika brulé et une magnifique verrine de betteraves et d’anguille fumée.
Deux bouchées merveilleuses de ces betteraves et de ce poisson qui résument à elles-seules tout le terroir dont elles sont issues. Un plat qui restera un vrai souvenir de ce restaurant (et nous n’avons toujours pas commencé notre repas).
Pour accompagner le premier plat, on nous sert un rosé ce qui est assez rare dans ce type d’établissement : un château Puech Haut rosé de Gérard Bru – Saint Drezery, c’est un vin d’assemblage avec une vinification basse température qui permet de conserver de la fraicheur et les aromes de fruits. N’étant absolument pas fan de rosé, je n’ai pas d’avis particulier sur ce vin que j’ai à peine gouté.
Jeune maquereau mariné, salade de crabe de la Mer du Nord, pousses et plantes salées, saveurs frais « concombre-citron vert-pomme aigrelette.
C’est un jardin de fond de mer, de poisson et d’algues, d’un bel esthétisme dans une assiette qui se referme sur le plat comme un coquillage protecteur avant que l’on ne dépose cette neige de fraicheur qui va envelopper notre maquereau et nos algues. J’ai adoré ce plat même si ce n’est pas le cas de tous à table. Si beau que l’on ose à peine y toucher. Ce sera le cas à de nombreuses reprises lors de ce repas.
Le second plat s’accompagne d’un vin allemand, un Riesling (pinot gris) de Baden Trocken – Spätelse graver- maison Michel. Je ne sais pas si tout est dans le bon ordre mais j’ai bien apprécié ce Riesling. On commence à sentir un peu inquiet sur la quantité de vin qui nous est servi car les verres sont généreux. A raison d’un vin par plat, notre raison va lâcher avant notre palais.
Asperges blanche de Zélande, jaune d’œuf légèrement fumé, crème de morilles et macaron à la Bière, langoustine et jus de Bernardus et citron vert.
A l’unanimité, le plat le moins apprécié du repas. La langoustine et la crème de morille se suffisent à elles-mêmes. (nous aurons également un plat d’asperges et morilles le lendemain chez De Karmeliet traité d’une façon totalement différente). Je ne suis ni fan d’asperges blanches et encore moins de jaune d’œuf. Le macaron est aussi aérien que celui de l’Arnsbourg et fond dans la bouche.
Le troisième plat est servi avec une merveille de vin que nous découvrons tous ce jour là. Un Gewurtztraminer de Marc Tempé Zellenberg 2006, au nez fleuri, à la bouche fruitée de roses, framboises et litchee. Nous avons littéralement la saveur de l’Ispahan d’Hermé en bouche. Un véritable dessert, dont nous avons du mal à comprendre l’association avec un crumble de foie gras d’oie.
Le plat de notre déjeuner. Une crème de foie gras à l’azote, avec une truffe de foie gras et Moscatel et un sorbet de pomme verte. Imaginatif, tout est parfait entre le croustillant, le suave, le frais, le légèrement sucré et le salé. Parfait.
Pour accompagner le Homard de Zélande aux légumes printaniers, oignon roti, herbes aigrelettes et fraiches, accompagné d’une vinaigrette de homard, chlorophylle et épices, un verre de Chateauneuf du Pape blanc de Patrick Magni Grandes Vignes du Roy 2007 (un grenache blanc).
La crème de petits pois et la bisque de homard soulignées par une huile aux épices me laissent assez indifférente même si la cuisson du homard est parfaite. J’ai trouvé la vinaigrette de homard trop proche de la bisque dont je ne suis pas une grande amatrice.
Dernier plat et premier vin rouge : un Côte du Rhône Village de chez Reynaud – Château des Tours, un peu épicé au léger goût de cacao. Encore une assiette dessinée et équilibrée avec un morceau d’agneau cuit à la perfection et une variation autour de la tomate et de la courgette, un nuage de mozarella fouettée quelques pousses de basilic et roquette et un trait de jus épicé.
Là-aussi désaccord entre nous sur l’intérêt de ce plat mais la simple beauté de ce morceau d’agneau et des légumes d’été m’a vraiment séduite. Tout est léger, absolument pas gras ce qui sera le cas de tous les plats de notre repas, l’assaissonnement est impeccable ainsi que la température à laquelle ils nous sont servis.
Nous décidons de goûter au plateau des fromages sagement présentés dans un meuble sur roulettes. Nous n’avons plus faim, notre taux d’alcoolémie a dangereusement augmenté mais nous restons vaillants devant la vieille Mimolette, et l’Epoisse. Le sommelier nous surveille et nous sert deux verres : un Vouvray de la Maison Huet – Clos du Bourg – un blanc demi-sec et une Gueuse, bière belge de 2005 pour accompagner les fromages à pâte dure. A ce stade, je ne fais que tremper mes lèvres dans les verres quant à notre ami Fabien, son teint vire au vert pâle, ce qui va lui gacher le reste du repas.
Une assiette très intéressante nous est servie : l’idée de la salade revisitée par un Sandwich crème de noix de pécan, miel et Roquefort, juste zestée de combawa. Une petite (malheureusement) « grande » assiette.
Cela fait 4 heures que nous sommes à table. Dehors le beau temps est revenu sur Sluis, il est temps de s’attaquer au dessert.
Comme pour les plats, les desserts sont construits comme des architectures ou des jardins.
Chocolat rocks : une mousse de chocolat, avec un insert de galanga, un trait de menthe et un sorbet au citron vert superbe, qui rattrape à peine cependant la déception du reste : le chocolat a peu d’intérêt et nous est servi trop chaud.
Ce dessert s’accompagne d’un verre de Casa de la Ermita 2006 – vin espagnol moelleux Dulce Monastrell qui effectivemet souligne la rondeur du cacao.
Le second dessert est ouvertement influencé par l’architecture de Zaha Hadid. Black : café, sésame noir et réglisse.
Habituellement je fuis le réglisse et adore le sésame noir et le café, mais cette association fonctionne merveilleusement. Il y a du fondant, du lisse et du granuleux, du léger et du croustillant, des textures, des matières et des formes qui rappellent effectivement l’architecture d’un bâtiment. Pour faire glisser le vaisseau, un Banyuls blanc 2005 dont je n’ai pas noté la référence mais qui fonctionne bien avec ce dessert très peu sucré.
Enfin le troisième dessert appelé 3 épices : basilic, mélisse, verveine, fleur d’oranger transparente et poudre d’amandes. Le nom n’est pas forcément justifié. On y retrouve un granité, un sorbet et une crème.
C’est frais, léger, également très peu sucré malgré la crème au chocolat blanc, on ne sent pas assez l’amande pour moi. 4 bouchées et c’est fini. Les verres traînent sur la table. Il nous reste le café accompagné d’un plateau de mignardises
- shot de fruits de la passion : on croit croquer un beignet et on découvre le froid glacial d’un bonbon gelé à la passion (magnifique)
- une lamelle de feuilleté, abricot et lait de soja
- chamallow à la vanille
- bouchée deux chocolats
- mignardise pistache aloe vera
- pâte de fruits de cassis
- meringue, gel d’agrume et citron vert
- bouchée chocolat tonka
- bouchée chocolat et vinaigre de Sauvignon.
Tout est beau comme dans un jardin japonais. La salle est vide, nous sommes prêts pour une petite marche digestive dans le village à 18 h, heure à laquelle on prend l'apéro habituellement.
Nous avons été globalement très satisfaits de notre visite en Zélande même si nous restons divisés sur ce restaurant. Principal reproche pour certains : les plats ne sont pas assez épurés, trop d’ingrédients, certains plats méritaient d’être divisés en deux plats séparés pour apprécier d’autant plus les produits du terroir qui nous sont proposés (ce sera un trait commun à d’autres restaurants que nous testerons lors du week-end). Nous avons fait l’erreur de prendre le menu avec la sélection des vins. Trop de vins, pas forcément toujours en adéquation avec les plats servis mais quelques belles découvertes dont ce Gewurtz.
Pour ma part, j’ai beaucoup apprécié l’esthétisme très précis et fleuris des plats, l’originalité des associations, la créativité du chef et sa générosité dans sa volonté de nous faire découvir les facettes de son talent sans faire de l'esbrouffe autour des nouvelles techniques culinaires même s'il les utilise de façon très intelligente. Si le service est loin des standards parfois trop guindés des 3 étoiles français, le jeune personnel en salle était agréable, professionnel mais assez froid. J’y retournerai avec beaucoup de plaisir car ce jeune chef trentenaire ne peut que nous réserver d'excellentes surprises à l'avenir.
Oud Sluis
Beestenmarkt 2
4524 Sluis - NL
tel: +31 117 46 12 69
www.oudsluis.nl
Je vous distillerai tout au long de ce printemps les compte-rendus de nos autres repas en Belgique : De karmeliet ***à Bruges, C-Jean* à Gand (belle découverte), l'Auberge de l'Herborist* à Bruges (très déceptif).
Une adresse de chambres d'hôtes avec Emmanuel aux commandes de cette maison du 16ème siècle. Confortable, idéalement située dans Bruges, nous avons été chouchoutés tout au long du week-end.
La Maison Le Dragon
Eekhoutstraat 5, 8000 Brugge,
Tel. +32 (0)50 72 06 54, info@maisonledragon.be
et enfin quelques images et tableaux qui me font beaucoup aimer cette partie des Flandres